C’est à croire que l’époque ne connaissait en musique que l’excellence et pas la médiocrité.
Je vais vous parler de 3 enregistrements plus que cinquantenaires très différents qui ont en commun, au delà de l’excellence, une rare complicité.
1961 Netania Davrath
La complicité la plus sincère est probablement celle qui s’inscrit dans l’anonymat au seul profit de la musique, et quelle musique!
Celle des Chants d’Auvergne, arrangés par Joseph Canteloube entre 1923 et 1930, chantés par une jeune soprano russe, Netania Davrath.
La pochette (il y en a eu de nombreuses, toutes différentes) ne cite pas l’orchestre et le chef n’y apparaît que sous le pseudonyme de Pierre de La Roche. L’éditeur Vanguard Records est un petit label créé en 1950 à New York. Il a commencé par éditer du classique, de haute qualité, sous l’étiquette Vanguard Classics
Le disque, bien sûr vinyle, a été enregistré en 1961 puis réédité en 2 CDs en 1993. Le fait que l’orchestre et le chef soient omis indique qu’il s’agit probablement d’un grand orchestre et d’un chef de renom mais sous contrat avec une des majors compagnies, très jalouses de leurs droits. L’orchestre de haut niveau a des sonorités qui rappellent le Boston symphony, le New York Philharmonic ou le Chicago symphony. A coup sûr il est dirigé par un français, d’où le choix du patronyme bidon. Mais une direction aussi claire, aussi enlevée en totale osmose avec la musique et la chanteuse fait irrésistiblement penser à un Pierre Monteux (mais les dates ne collent pas), en tous cas il s’agit d’un chef comprenant parfaitement l’esprit des « Chants d’Auvergne », son terroir, son ancrage régional dans le Cantal.
Netania Davrath , ukrainienne d’origine juive (1931 – 1987) y est géniale avec une voix juvénile d’une pureté et d’un naturel qui convient ici encore mieux que celle de Victoria de Los Angeles, quelques années plus tard avec EMI, et qui était jusqu’ici ma référence (Orch. des Concerts Lamoureux, dir. Jean-Pierre Jacquillat, enregistrement EMI effectué à Paris en 2 fois en 1969 et 1974, ingénieur du son Paul Vavasseur). Son implication est totalement convaincante, et elle fait montre le cas échéant d’une autorité stupéfiante. L’Occitan est manifestement une langue dont les intonations, les accents, sont étrangement proches de sa langue natale et on sent combien Netania est à l’aise avec ce texte. C’est un régal de chaque instant, dans une prise de son excellente et tout à fait dans le style de Decca. Là encore, aucune indication sur le lieu, la date, l’ingénieur du son.
Une disque aussi mystérieux que magnifique et indispensable.
Le répertoire de Netania Davrath comprend à la fois l’opéra et des pièces de concert. Elle a collaboré avec des chefs prestigieux: Leonard Bernstein, John Barbirolli, Leopold Stokowski, Zubin Mehta et plusieurs orchestres: l’Orchestre philharmonique de New York, le Chicago Symphony Orchestra, le London Philharmonic, l’Orchestre philharmonique d’Israël, le Lyric Opera de Chicago, et l’Opéra de Boston, entre autres. Elle a enregistré dix disques avec le label Vanguard Classics. Netania Davrath parlait couramment huit langues.
http://historicoperasingers.blog.com/2012/12/21/netania-davrath-soprano/
1959 Pierre Fournier et Friedrich Gulda
Beethoven, les sonates pour violoncelle et piano 3, 4, 5, enregistrées à la Salle Brahms du Musikvrein de Vienne en 1959. Ici la complicité devient de la connivence jubilatoire. Jamais je n’ai entendu un tel engagement, une telle fougue, aussi bien traduite par la prise de son de Heinz Wildhagen (Deutsche Grammophon) . Deux tempéraments opposés qui s’affrontent mais qui se réconcilient dans l’instant! Réédité par Diapason « Les Indispensables de Diapason ». Une vraie jam session, presque du jazz ! on est scotché.
1959 Miles Davis
Kind of Blue, New York 1959, version Legacy remasterisée en 2008 par Columbia Records
Kind of Blue serait non seulement l’album le plus vendu de Miles Davis, mais aussi le disque de jazz le plus vendu de tous les temps.
La brochette de musiciens est impressionnante:
Miles Davis – trompette , chef d’orchestre
Julian « Cannonball » Adderley – saxophone alto , sauf sur « Blue in Green »
Paul Chambers – contrebasse
Jimmy Cobb – tambours
John Coltrane – saxophone ténor
Bill Evans – piano (sauf « Freddie Freeloader »)
Wynton Kelly – piano sur « Freddie Freeloader »
Ceux qui n’ont qu’une vague idée de ce que peut être l’improvisation en jazz, tout en restant autour d’un thème, écouteront les différents solos. C’est de la création pure, de l’inventivité à chaque instant, sans redite, sans la moindre faiblesse d’inspiration et encore moins rythmique… on attend chaque phrase avec gourmandise, et ça coule de source… comme du Mozart. Cela semble si simple, si évident. Là encore, la complicité est à un niveau rarement atteint même en Jazz. La prise de son connait quelques problèmes de saturation du micro à chaque début de plage. C’est vite rectifié, ou presque, par l’ingénieur du son, Fred Plaut. Mais en fait, 10 secondes plus tard, on s’en fiche complètement.
http://en.wikipedia.org/wiki/Kind_of_Blue
>>> Si vous ne partagez pas mon enthousiasme pour ces 3 enregistrements, posez-vous la question de savoir si votre chaîne hi-fi n’en est pas la cause.
Une chaîne non euphonisée éteint la vie, rend les choses plates, insipides, banales et inintéressantes. Elle vous fait passer à côté de merveilles. Songez-y!
Euphonie, euphoniser, euphonisation
L’euphonisation se fait en traitant le courant secteur, la terre, la source (le phonogramme, le PC lecteur et la carte-son externe ou le DAC externe ou bien le lecteur CD de salon), le préampli, le ou les amplis, les enceintes, les câbles, l’acoustique du local, l’environnement électromagnétique. Euphoniser une chaine hi-fi consiste à faire cohabiter de manière harmonieuse la source musicale, le système audio, la pièce d’écoute et l’environnement tant au niveau acoustique qu’électromagnétique. C’est apprendre à tous les acteurs d’un système audio hi-fi à vivre ensemble, à collaborer pour s’approcher au plus près de la musique vivante directe.